Défaillance est une rencontre entre l’image numérique et la technique artisanale du tissage. Composé de deux autoportraits presque identiques tissés l’un dans l’autre, ce travail photographique est l’aboutissement d’un effort assidu porté par une réflexion sur la mémoire, et plus précisément sur ce qui lui échappe ou lui « fait défaut ». En employant des patrons de tissages pour traiter les images, je matérialise en effet le concept de glitch issu des défaillances de la mémoire d’un circuit informatique. Le portrait à l’origine très clair est brouillé par l’intégration de sa version hors foyer. Étrangement, le résultat ressort si détaillé qu’il apparaît presque surréaliste. Notre œil travaille alors très fort à la reconstitution d’une image dont la résolution lui semble imminente mais qui ne se complétera jamais. Le sentiment de frustration provoqué par cette expérience s’apparente au travail de la mémoire lorsque nous tentons en vain de nous rappeler un visage : certains détails sont précis alors que d’autres ne cessent de fuir. De telles sensations d’inconfort, de malaise et de confrontation sont récurrentes dans ma pratique sur l’identité et l’autoreprésentation; je les stimule en portant une attention particulière au regard et par la construction d’un espace envahissant.
